La CPAM et le remboursement d’indu: des conditions restrictives

Les fondements de l’action en récupération d’indus

En cas d’inobservation des règles de tarification ou de facturation et notamment de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) la caisse d’assurance maladie peut poursuivre le professionnel, qu’il soit infirmier (IDEL), médecin généraliste, chirurgien-dentiste, kinésithérapeute, chirurgien esthétique, etc. et lui faire une réclamation d’indu.

Cette procédure est prévue à l’article L 133-4 du code de la sécurité sociale qui prévoit que « l’organisme de prise en charge recouvre l’indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement ».

Le professionnel reçoit une notification de payer de la part du directeur de la caisse d’assurance-maladie (CPAM). Le professionnel ou l’établissement a un délai de deux mois pour former une contestation de l’indu et présenter ses observations écrites et/ou saisir la commission de recours amiable.

En cas de rejet de sa demande, le directeur adresse une mise en demeure de régler dans un délai d’un mois, à défaut la somme est majorée de 10%.
Cette mise en demeure doit préciser les causes et montant de l’indu ainsi que les motifs de rejet de la contestation.

En tout état de cause, le professionnel ou l’établissement peuvent saisir le Tribunal de Grande Instance pôle social pour contester l’indu après avoir saisi la commission de recours amiable dans les délais.

Malgré l’existence de cette procédure spécifique, les caisses ont cherché à invoquer la responsabilité civile délictuelle du professionnel de santé, qu’il soit médecin, dentiste, infirmier ou infirmière, etc. et à se fonder sur l’ancien article 1382 et le nouvel article 1240 du code civil en assimilant les erreurs et irrégularités de facturation à une faute civile ayant causé un préjudice à la caisse correspondant aux sommes que les caisses estiment avoir indument versées.

La position de la jurisprudence

Dès 2003, la cour de cassation, dans une affaire relative au remboursement des indus auprès d’un chirurgien-dentiste, a considéré que seule la procédure instituée par le code de la sécurité sociale pouvait être utilisée en cas d’inobservation des règles de tarification et de facturation à l’exclusion de toute autre. (chambre sociale, 31 mars 2003, n°01-21.470).


Il en résulte que la caisse d’assurance-maladie ne peut invoquer la responsabilité civile délictuelle du professionnel de santé.

Dans un arrêt du 17 février 2011, la cour de cassation a estimé qu’à défaut pour la caisse d’invoquer le bon fondement, elle est irrecevable et le juge n’a pas le pouvoir de requalifier sa demande. (2ème chambre civile, 17 février 2011, n° 09-66.756).

En 2015, la cour de cassation rappelle à propos d’un médecin généraliste : (2ème chambre civile, 28 mai 2015, n°14-15.546, à propos d’un médecin généraliste) : « en cas d’inobservation de la NGAP ou des règles de facturation, la procédure de recouvrement de l’indu obéit aux dispositions spécifiques de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale (…) la cour d’appel en a déduit exactement que la caisse était irrecevable à demander la condamnation de Mme X… sur le fondement de l’article 1382 du code civil ».

Tout récemment, en matière de chirurgie esthétique, par un arrêt du 24 janvier 2019 (n°16-28.082), dans une espèce concernant la facturation d’actes et de consultation de chirurgie esthétique, la cour de cassation a cassé la décision de la cour d’appel et a rappelé « qu’est seule recevable l’action engagée selon la procédure de recouvrement de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale (…) par un organisme de prise en charge, lorsque la demande de ce dernier porte exclusivement sur le remboursement de prestations indues en raison de l’inobservation des règles de tarification ou de facturation des actes imposées au professionnel de santé, que celle-ci résulte d’une simple erreur ou d’une faute délibérée ».

La persistance des caisses à invoquer la responsabilité civile délictuelle du professionnel de santé, malgré la jurisprudence de la cour de cassation, s’explique sans doute par le formalisme imposé par l’article L133-4 et ses conditions plus restrictives en matière de prescription.

Toutefois, il convient donc rappeler que les CPAM ne peuvent invoquer la responsabilité civile de droit commun soumise à la prescription de 5 ans, pour échapper à la prescription de trois ans à compter de la date de paiement de la somme considérée, prescrite par le code de la sécurité sociale.

Si vous souhaitez être conseillé et assisté dans une procédure de récupération d’indu,  contactez le cabinet Yavocats , ou demander une consultation en ligne. 

Léa Segui

Me Carole Younes, avocate à la Cour

 

3 réponses

  1. Bonjour Maitre,
    J’ai actuellement des problèmes avec la CPAM en pleine période pendant laquelle notre travail est extrêmement compliqué par ces mesures sanitaires contre le Covid et l’activité largement ralentie car les patients sont très anxieux, les charges sont toujours très fortes.
    La Cpam vient de m’adresser une procédure d’indus, me demandant de rembourser la somme 11 763,68e qu’elle estime indûment perçue.
    Ses arguments sont très contestables, il y a un bon nombre d’erreurs dans ses appréciations, mais je ne souhaite pas aller au tribunal si possible.
    Le premier temps est un recours amiable dans les deux mois, ce que je prépare actuellement.
    Selon mon syndicat, ce recours modifie guère leur position, car il est géré par la Cpam.

  2. Bonjour,
    Suite à un indu de 300€ en 2017, les huissiers ont saisi sur mon compte une somme de 913€ sous le mandat de la CPAM. Le problème est que je n’ai reçu aucune relance depuis 2017 où j’avais payé la moitié de l’indu.
    Voici ma situation, la CPAM m’avait demandé 634€ suite à un trop perçu de ma part et en ce moment là je leur avais payé 300€ dans un premier temps et leur dire que je paierai le reste plus tard. Sauf que j’avais complètement oublié mais à aucun moment ils m’ont relancé depuis 2017 pour me le rappeler.
    Aujourd’hui en 2021, ils ont mandaté des huissiers qui sont venus directement saisir mon compte d’une somme de 913€ sans rien dire.
    Alors je voudrais savoir qu’est-ce ce que la justice me donne le droit de faire aujourd’hui et qu’est-ce ce que vous en pensez?
    Merci d’avance pour vos réponses.

    Cordialement.

  3. La cpam pretend régulièrement des Indus injustifiés et fini par se servir. Impossible de se faire entendre. J ai eu plusieurs procédure, j ai tout justifié in fine C est ou on. Payé ou on nous bloque l agrément. A quand une association de défence impartiale, pour tous ces professionnels qui travaillent sérieusement et ne peuvent se défendre.

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